TEXTES
I. UNE AVENTURE EFFRAYANTE
L’auteur et son jeune compagnon se perdirent dans la montagne. Il faisait déjà nuit quand ils arrivèrent près d’une maison fort noire, et ils durent y passer la nuit …
La nuit s’était presque passée. Mon camarade dormait et moi, je commençais à me rassurer, quand j’entendis au-dessous de moi notre hôte et sa femme parler et se disputer ; et je distinguai parfaitement ces propres mots du mari : « Eh bien, enfin, voyons, faut-ils les tuer tous les deux ? » A quoi la famme répondit : « Oui ! … » Et je n"entendis plus rien.
Je restai respirant à peine, tout mon corps froid comme un marbre : à me voir, vous n’auriez su si j’étais mort ou vivant. Dieu ! quand j’y pense encore ! … Nous deux , presque sans armes, contre eux, douze ou quinze, qui en avaient tant ! Et mon camarade mort de sommeil et de fatigue ! L’appeler, faire du bruit, je n’osais ; m’échapper tout seul, je ne pouvais ; la fenêtre n’était guère haute ; mais en bas, deux gros chiens hurlant comme des loups …
Au bout d’un quart d’heure, qui fut long, j’entendis dans l’escalier quelqu’un, et, par la fente de la porte, je vis le père, sa lampe dans une main, dans l’autre un de ses grands couteaux. Il montait, sa femme après lui, moi derrière la porte : il ouvrit ; mais, avant d’entrer, il posa la lampe que sa femme vint prendre ; puis il entra pieds nus ; et elle , de dehors , lui disait à voix basse : « Doucement, va doucement. »
Quand il fut à l’échelle, il monte, son couteau dans les dents ; et, venu à la hauteur du lit, d’une main il prend son couteau, et de l’autre … Ah ! mon ami … il saisit un jambon qui pendait au plafond, en coupe une tranche, et se retire comme il était venu. La porte se referme, la lampe s’en va, et je reste seul à mes réflexions.
Dès que le jour parut, toute la famille vint nous réveiller comme nous l’avions recommandé. On apporte à manger ; on sert un petit déjeuner fort bon, je vous assure. Deux chapons en faisaient partie, dont il fallait, dit notre hôtesse, emporter l’un et manger l’autre.
En les voyant, je compris enfin le sens de ces terribles mots : « Faut-il les tuer tous les deux ? »
VOCABULAIRE
effrayant-e a. dreadful
l’auteur m. author
le compagnon companion
se perdre v. to lose one’s way
camarade n. comrade
se rassurer v. to feel reassured
au-dessous de prep. below
l’hôte –sse n. host (hostess)
se disputer v. to wrangle
distinguer vt. to distinguish
parfaitement adv. perfectly
à peine adv. hardly
le marbre marble
mort –e a. dead
vivant –e a. alive, living
le dieu ; Dieu god, God
l’arme f. weapon, arms
tant adv. so much, so many
le sommeil sleepiness
la fatigue fatigue, tiredness
s’échapper v. to escape
ne … guère hardly (any)
en bas adv. down
hurler vi. to howl
le loup wolf
la fente chink
le couteau knife
nu –e a. naked
de dehors adv. from outside
bas –se a. low
doucement adv. gently
l’échelle f. ladder
à la hauteur de prep. beside
saisir vt. to seize
pendre vi. vt. to hang
le plafond ceiling
se retirer v. to retire
la tranche slice
le chapon capon
II. SIGNER LE PANTALON
Le peintre Vuillard travaillait dans son atelier. Près de lui était assis l’écrivain Jean Giraudoux qui admirait ses oeuvres. Voilà qu’à un moment le peintre laissa tomber un peu de peinture sur le pantalon de Giraudoux.
——Excusez-moi, je vais chercher un peu d’essence pour enlever la tache, dit le peintre en regrettant de n’avoir pas fait attention.
——Mais non, je vous en prie … laissez la peinture où elle est et signez-moi mon pantalon.
VOCABULAIRE
signer vt. to sign